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Valence 2017 : le retour en grâce d’un champion et l’exploit d’une jeune outsider

Le 11 juin 2017

Manu Romain en champion

Elle était pourtant terrible cette voie de finale. Magnifique, inédite, mais terrible. « Il leur fallait se mettre tout de suite dans le tempo. Ceux qui partaient sur un faux rythme, sont sortis très vite. C’est un 8c intense, qui demande force et résistance. Et puis, nous leur avons concocté un passage très original, selon moi quelque chose qui n’a jamais été vu », expliquait Mike Fuselier, le chef ouvreur de la compétition. 

 

Dur de mettre des mots sur cette excentricité. Néanmoins, une fois passée une première partie sur des plats fuyants, et une traversée en no foot, les grimpeurs étaient aux prises avec une série de volumes dans un dièdre, qui leur imposaient un mouvement de contorsion plutôt original. 

 

Un tracé qui demandait donc de l’engagement, et qui avait une dimension indéniablement anxiogène. Cela s’est ressenti pour la plupart des grimpeurs. Pour tous ? Non. Tanguy Topin ne comptait pas parmi les favoris. Il en était conscient, et participer à la grande finale du jour était déjà – pour lui – un aboutissement. « Franchement, je voulais juste me faire plaisir, dans cette voie qui était faite pour moi. Mais c’est vrai que sur une finale avec autant de mouvements engagés, tout peut arriver. Alors je n’y suis pas non plus allé pour faire de la figuration », réagissait le jeune homme.

 

Un festival. Une fois la traversée randonnée, et le mouvement de contorsion parfaitement exécuté – Tanguy Topin s’est même payé le luxe de faire le show. Le jeune homme, comme dopé par son audace, s’en va placer la barre très haute dans la voie. Pas de grimace une fois pendu au bout de la corde. Tanguy Topin sait déjà qu’il vient de réaliser une de ses plus belles performances en compétition : « devenir vice-champion de France est un rêve qui se réalise. Je suis sur un nuage », réagissait le grimpeur, tout sourire, quelques minutes plus tard.

 

Il y en a un autre qui n’était pas stressé au pied de la voie. Manu Romain n’était pas à Valence pour prendre une qualification en équipe de France. Ni pour se battre pour un titre. Ce qui l’animait ? « La compétition me manquait. M’entraîner dur pour un objectif, aussi. Alors j’ai décidé de me préparer pour ce grand rendez-vous avec Romain (Desgranges). Parce qu’on est tous les deux des « imbéciles » de compétiteurs (rire). Et qu’on adore se challenger », expliquait le champion.

 

C’est sûrement ce qui explique qu’il est arrivé dans cette finale sans tension. Qu’il est passé outre quelques déconvenues dans la première partie de la voie, sans paniquer. Et qu’il est allé au courage – et fort de sa résistance légendaire – plus haut qui quiconque aujourd’hui (marque 39). 

Manu Romain est – après trois saisons hors du circuit – champion de France 2017. « Manu, c’est bien toi cette fois le capitaine du Black Pearl – comprendre du « navire tricolore », l’interpellait le speaker Christopher Hardy. « Peut-être aujourd’hui, mais je laisse très volontiers la barre à Romain (Desgranges), qui est plus fort que moi ! » 

 

A voir son rictus de déception lorsque son pote Chamoniard tombait après le 33e mouvement, prenant ainsi la médaille de bronze, il ne fait aucun doute que Manu Romain est sincère : il voyait Romain Desgranges à ses côtés tout en haut !

 

« C’est une surprise pour beaucoup d’entre vous, que Manu gagne aujourd’hui. Mais pas pour moi : il a travaillé dur pour retrouver ce niveau, et il est arrivé à Valence fin prêt. Je savais qu’il avait le potentiel pour gagner. Quant à moi, j’ai toujours du mal à m’exprimer complètement dans ce type de voies. C’est de l’escalade pour les jeunes (sourire), j’ai dix ans de trop », conclut Romain Desgranges, dans un mélange de fatalisme et d’autodérision.

Tous les résultats des hommes.

L’exploit de Nolwenn Arc

Elle était la principale outsider du jour, bien décidée à semer le trouble dans l’ordre établi. Quatre grimpeuses semblaient tenir le haut du pavé dans cette finale. Salomé Romain (finalement 4e), Hélène Janicot (finalement 6e, battue par Nolwen Berthier), Mathilde Becerra (finalement 3e) et la favorite parmi les favorites, Julia Chanourdie (finalement 2e).

 

Mais toutes les quatre ont connu des moments difficiles à la mi-voie, dans une traversée compliquée. Un périlleux mouvement de désescalade, suivi d’une transition inconfortable vers la dernière section du tracé. « C’était vraiment dur », concède Mathilde Becerra, qui chutera deux mouvements plus loin, et prendra finalement la médaille de bronze. 

 

Les hésitations de Julia Chanourdie dans cette section, et ses larmes lorsqu’elle chutait quelques prises plus loin, confirment les propos de la championne de France en titre. « C’est dommage pour Julia. Elle avait de la marge par rapport aux autres filles, je pense qu’elle s’est mise trop de pression », assume Mike Fuselier, quittant quelques instants son rôle d’ouvreur, pour enfiler sa casquette d’entraîneur national. La finaliste de Bercy prend – comme en 2016 – la médaille d’argent. 

 

L’exploit de Nolwenn Arc. Car oui, c’est une performance hors du commun, qu’a réalisé la championne de France cadette. Passant non sans difficulté la transition vers le dernier pan de la voie, ce n’est que grâce à sa résistance et à sa détermination, qu’elle est parvenue à poser trois mouvements de plus que les deux autres médaillées du jour. Et à devenir, à 17 ans seulement, championne de France de difficulté.

 

Tous les résultats des femmes.

Retour sur les demi-finales.

Retour sur les qualifications.