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L'ENAF à l'assault du Brahmasar I

Le 13 novembre 2025

Récit et photos @ENAF

En octobre 2025, L’Equipe nationale d’alpinisme féminine (ENAF) a mis le cap sur l’Himalaya indien, dans la région de l’Uttarakhand, une expédition qui marque la fin du cycle de formation de la promotion actuelle. L’objectif : ouvrir une voie en haute altitude, dans une zone reculée et peu explorée.

Le sommet

Le sommet choisi est Le Brahmasar, un sommet discret, repéré pour la première fois en 2002 par une expédition anglaise, qui se niche entre les glaciers de Satling et de Dudhganga, au sud du célèbre Thalay Sagar (6904 m).
Depuis, seules deux équipes, une allemande en 2013 et une américaine en 2014, ont foulé la région avant qu’elle ne replonge dans le silence.
Le Brahmasar, du nom de Brahma, le dieu à trois têtes, compte trois sommets dont un seul reste vierge : le Brahmasar I. Son arête nord, raide et régulière, attire aussitôt l’attention de l’ENAF. Et la vallée de Satling, littéralement « la vallée des sept pics » (saat signifiant sept en hindi), s’annonce comme un terrain d’aventure à la mesure des envies de l’équipe.

L’équipe

L’équipe est constituée de trois stagiaires, toutes aspirantes-guides à l’ENSA, Sophie Jacob, Isis Millerioux et Mathilde Badoual, encadrées par Lise Billon et Maud Vanpoulle.

L’expédition

L’expédition débute dans le petit village de montagne de Gangi, après deux jours de route depuis Delhi. Accompagnées de quatorze porteurs népalais, l’équipe remonte la vallée de Bilanghna en deux jours de marche à travers une jungle dense, peuplée d’oiseaux et de singes.

L’installation du camp de base s’avère complexe : il faut négocier avec les porteurs pour le placer au-delà de la rivière principale. Et comme si la logistique ne suffisait pas, la mousson, pourtant censée être terminée, joue les prolongations. La neige recouvre rapidement la vallée d’une épaisse couche blanche — un signe peu encourageant pour la suite en altitude.

Après le camp de base, direction le camp de base avancé ! L’idée est d’avoir des tentes, de la nourriture et du matériel à demeure au pied des faces que l’équipe souhaite grimper, et ainsi être prêtes à toutes éventualités. L’installation du camp de base avancé se fait en même temps que le processus d’acclimatation, c’est donc une montée chargée et lente pour éviter le mal aigu des montagnes (MAM). Mais la neige rend cette étape difficile et plus longue que prévu. L’arrivée au camp de base avancé, situé sur le glacier de Salting à 5000m, se fait après quatre laborieux jours à tracer dans la neige fraîche.

Dès les premiers pas sur le glacier, l’équipe prend conscience des effets de presque 12 ans de changement climatique depuis la dernière expédition, le glacier est en recul, et les sommets présentent des marques d’éboulements. Les faces nord manquent de glace, sont couvertes de neige instable, tandis que les faces sud dévoilent un magnifique granite.

Malgré tout, après quelques jours d’acclimatation, Sophie, Isis, Lise et Maud lancent une tentative d’ascension sur l’arête nord du Brahmasar I, prévue en quatre jours. Mais la montagne ne se laisse pas apprivoiser : le rocher est compact, la neige inconsistante, et les conditions trop précaires pour envisager une progression sûre. Au terme d’une longue journée, l’équipe fait demi-tour. La déception est brève ! Ce demi-tour permet de se retrouver à cinq et d’aller explorer le superbe granite des faces sud.

Ensemble, l’équipe recentre ses forces sur un objectif en rocher : une arête ouest de 300 m sur un sommet de granite culminant à 5300m juste au-dessus du camp avancé : la pointe Walkers. La ligne, soutenue (6a max) et très esthétique, est gravie à la journée, avec une descente de nuit. Elle sera baptisée « Bhālō and the Biscuit », clin d’œil à un ours (bhālō en hindi) rôdant autour du camp de base, et à la marque de biscuits Walkers, sponsor de l’expédition anglaise qui avait donné son nom au sommet.
Le lendemain, une deuxième voie sur l’arête est du même sommet est répétée, cette fois en terrain mixte, avant une redescente rapide dans la vallée pour éviter les précipitations qui viennent refermer ce long créneau météo.

 

Au-delà des sommets gravis, cette expédition restera une belle réussite collective. Car en Himalaya, l’équation déjà complexe du 3×3 — conditions du terrain, météo, facteur humain — se multiplie à l’infini : altitude, distance, logistique, matériel, incertitude…
L’équipe en ressort soudée, inspirée, et riche d’une expérience dans l’univers exigeant de l’alpinisme en haute altitude.

Un grand merci à nos coachs, Lise et Maud pour leur encadrement, leurs sages conseils et leur soutien. Merci également à Cimalp, Mont-Blanc, Grit&Rock, Soroptimisme, le Topo et la Belfius Banque pour leur aide.

Pour candidater à la prochaine promo c’est ici : Les candidatures pour les sélections des Equipes Nationales d’Alpinisme (ENAM et ENAF) sont ouvertes !  – FFME